vendredi 22 mars 2013

CONFÉRENCE: UNE LITTÉRATURE TOGOLAISE À LA CROISÉE DES CHEMINS

La littérature togolaise monte en quantité et en qualité, mais l’édition et la critique demeurent ses faiblesses,  lourd handicap pour son envol véritable.

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La littérature togolaise existe bel et bien, en tout cas celle en langue française ; elle est même écrite en plusieurs langues dont l’italien et l’anglais. Sa naissance remonterait même en 1929, année de L’Esclave de Couchoro (grande querelle entre Togolais et Béninois sur cet auteur). Finie donc la polémique insidieuse de Kossi Efoui sur l’existence d’une littérature africaine et partant togolaise. Unanimisme. Le sujet d’actualité c’est de connaître la destinée d’une telle littérature, justement le thème de la 3ème conférence de Plumes Francophones : Où va la littérature togolaise : production, réception et questions de genre. Une conférence animée par des universitaires Jean-Jacques Dabla, Koffi Anyinefa, Prosper Deh et Kangni Alem. Un plateau assez relevé, tous les conférenciers sontauteurs, essayistes, ayant écrit un ou plusieurs ouvrages sur la littérature africaine ou togolaise.
Longtemps reléguée à la marge de la littérature africaine avec la publication d’une poignée d’auteurs, la littérature togolaise connaît une émergence depuis le début des années 1990.  Des auteurs reconnus à l’étranger par des prix (Sami Tchak, Kossi Efoui, Edem Awumey, Kangni Alem) participent de cette renaissance tandis que d’autres  en Europe et aux Etats-Unis publient dans d’autres langues, même s’ils sont très peu ou pas du tout traduits en français. A l’intérieur du Togo, on constate également l’arrivée de jeunes auteurs, la production d’œuvres de qualités diverses, parfois franchement très médiocre.  Sur ce point précis, Kangni Alem suggère à la nouvelle Association des écrivains togolais (AET) la création d’une revue de littérature pour aider à l’émergence de jeunes auteurs. Pour l’auteur de Cola Cola Jazz, c’est souvent par ce canal- notamment celui de la Revue Noire et Le Serpent à Plumes-  que de nombreux auteurs togolais ont été détectés par de grands éditeurs en France. Reste à savoir, si l’AET peut relever un tel défi.
D’où la question problématique de l’édition.  L’édition reste le talon d’Achille de cette littérature montante et une réforme indispensable enraierait   une production en deçà des attentes. Deux maisons d’édition occupent le haut du pavé. La très volontariste quoique peu professionnelle Awoudy (un catalogue relevé après quatre années d’existence) et la professionnelle et moins ambitieuse Graines de pensées dont le public attend un relèvement du niveau de l’édition. Pour l’instant, l’édition joue dans le registre du droit d’auteur, toute la machine commerciale n’est réellement pas mise en œuvre pour lapromotion de l’auteur. Les livres sont produits et très peu connus, même si on évolue dans un environnement culturel caractérisé par l’absence d’une volonté publique quant à la promotion du livre et de la lecture. En ce sens, les conférenciers et les participants ont déploré la non-application de la ratification de l’Accord de Florence sur la circulation des biens culturels et scientifiques.
Un autre défi à relever pour la littérature togolaise reste celui de la réception, surtout la critique journalistique et universitaire. Sur ce plan, le registre est presque désert. La critique journalistique, parfois promotionnelle, ne manque pas en ce qui concerne les œuvres publiées en France ou à l’étranger, mais, sur le plan national, il n’y a aucune institution existante. La presse déjà pauvre en qualité demeure très déficitaire quand il s’agit de relayer les productions littéraires.
La critique universitaire  au Togo est pointée du doigt en ce domaine par Koffi Anyinefa du Collège Haverford, Etats-Unis. Une fainéantise et un manque de passion sont à la base de l’absence d’études sur les œuvres togolaises. La plupart des universitaires veulent avoir un intérêt matériel ou pécuniaire avant de réaliser des études sur les auteurs togolais. Conséquence : Kossi Efoui est le seul auteur qui rassemble la grande partie de la critique universitaire sur la littérature togolaise. Son théâtre et son roman relèvent d’un grand intérêt pour la critique universitaire en France. On peut également citer Sami Tchak sur qui vient d’être fait un essai. Mais d’une manière générale, la critique est quasi absente voire déserte en ce qui concerne la littérature togolaise. Il en est de même de la traduction de nombreuses œuvres togolaises écrites dans des langues étrangères.
Koffi Anyinefa et Kangni Alem en appellent à un sursaut dans ce domaine. Seront-ils entendus ?

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